Extrait Que
vais-je
pouvoir dégoiser?? Je n’accepte pas non plus la mort de
Mia.
Alors j’ai un peu bu. À vrai dire beaucoup. Je remonte
clopin-clopant
l’allée centrale en direction du chœur. Sur le cercueil,
une ancienne
photo de Mia. Je me demande pourquoi Yann n’en a pas
choisi une plus
récente, elle était si ravissante encore au moment de sa
disparition,
avec ses yeux vert clair taillés en amande et sa
chevelure paille
cascadant autour de son visage ovale. Mais ce n’est pas
le moment de
pinailler à propos d’une photo, la foule attend, dans un
silence que
soulignent quelques timides toussotements et grincements
de chaises. Un
silence qui décuple ma frousse. […]
La voûte descend sur moi et m’écrase, les murs se rapprochent, je respire difficilement. Je ne vois pas les gens, je ne veux pas les voir. Ils me dégoûtent, à déjà se régaler des paroles pathétiques que je suis censé leur débiter. Et Yann, pourquoi me joue-t-il un tour pareil?? Je le cherche, mais ma vue se brouille. Il n’y a plus personne dans l’église. Plus que Mia et moi. Mia figée, glacée dans son cercueil étincelant, et moi complètement éteint, gris comme la cendre. Je m’entends dire Mia, quand je t’ai rencontrée, voici cinq ans, je t’ai aimée d’un seul coup. Je ressens encore aujourd’hui la violence de ton appel. Je t’ai désirée tout de suite. Je m’étais juré de ne jamais te l’avouer pour ne pas te troubler. Oui, Mia, je t’aimais à ce point, jusqu’à l’effacement. Avec ton mari et tes enfants, nous nous retrouvions tous les mois, soit chez toi, soit chez moi. Deux années, deux longues années durant lesquelles j’ai muselé mon cœur. Et un jour de courage, ou de faiblesse, je ne sais, je t’ai révélé mon terrible secret. Et nous devînmes amants, comme emportés par un tourbillon. Mia, mon amour, j’aimais tant te retrouver dans une chambre d’hôtel. Nous ne réservions jamais la même, c’était un peu comme si nous promenions notre amour à travers toute la ville. Un amour nomade. Ah?! ces chambres?! Tout en elles distillait le plaisir, la joie, la complicité : les persiennes filtrant la lumière, les fauteuils accueillant nos vêtements arrachés, la douche assez vaste pour nous deux, les essuies éponges qui préparaient nos corps pour la fête, et le lit, ah ! le lit, impatient de nous offrir ses draps blancs et parfumés… |
Ce qu'ils en ont dit * Le
jour des funérailles de Mia, Jean révèle à tous sa
liaison avec celle
qu’on inhume. Une mère de famille exemplaire, une
enseignante appréciée
et une épouse fidèle. Son aveu déclenche la colère des
proches, qui
crient à l’insulte. Une échauffourée s’engage et oppose
le veuf à
l’amant. L’intervention de la police calme les deux
parties. Relaxé
après une courte garde à vue, il se remémore sa liaison
intense et,
jusque-là, tenue secrète. Le film du passé se libère
devant ses yeux et
lui livre une série d’images ardentes. Il revoit surtout
ces chambres
d’hôtel anonymes, où tous deux pouvaient donner libre
cours à leurs
désirs, loin du regard des autres et sans craindre une
dénonciation.
Chaque porte fermée derrière eux représentait un
commencement, un
renouveau, une étape supplémentaire mise au service d’un
amour
illicite. Malgré le deuil, le protagoniste sait que
l’existence se
poursuit quoi qu’il advienne et que personne ne peut
dénouer ce qui a
été attaché. Il évoque les moments de félicité, son
statut d’ami de la
famille, un père autoritaire et une mère mêle-tout. Dans
son crâne,
tout se met subitement à s’agiter, à se reconstituer
comme un puzzle
aux mille pièces égarées çà et là. Jean-Pierre Balfroid
propose une
mosaïque un brin nostalgique et qui se parfume
d’effluves d’autrefois.
«?Le choix de Mia?», son premier roman, louvoie en
permanence entre
tension dramatique, non-conformisme et humour aux
confins du non-sense.
Sam Mas, Bruxelles-Culture *
Le scénario est captivant, le rythme alerte, le style efficace, beaucoup d'humour et des petites fleurs d'une grande poésie parsèment tout le livre. Les personnages évoluent, comme dans la vrai vie, leur psychologie n'est pas figée dans leur caricature originale. Les surprises et retournements de situation sont nombreux et tout à fait crédibles. C'est un ravissement que de lire ce livre, on est devant une histoire qui, par beaucoup d'aspects, est très crédible et l'on se prend à penser que certaines scènes sont assez proches de notre propre vécu. Même certaines scènes particulièrement comiques drôles restent crédibles, . Je me rends compte que nous vivons des situations parfois très drôles sans nous en rendre compte. le tout est de discerner leur comique. J'ai parfois ri aux éclats, Il est rare de rire tant en lisant des livres qui traitent de problèmes comme l'adultère, le divorce, le harcèlement. Guybab, Babelio *
Les 20 premières pages s'annonçaient pourtant bonnes : de l'humour noir, une pointe d'absurdité et une belle répartie. La truculente scène d'ouverture se transforme en un retour sur le passé sous forme de cahier posthume pour Mia et souvenirs de Jean. L'effet de départ tombe un peu à plat, dommage. On revient ensuite au présent, avec quelques scènes abracadabrantes. Quelques-unes sont réussies (j'ai bien aimé la scène du docteur qui trouve un lien entre culture et cancer), mais la plupart n'apportent rien. J'avais plutôt l'impression qu'elles servaient uniquement à aborder divers sujets d'actualité (terrorisme, viol, suicide, médecines alternatives, etc.), mais à chaque fois, tout retombe comme un (mauvais) soufflé. Je suis déçue, car l'écriture est agréable, et l'histoire se déroule dans ma ville. À part la scène aux obsèques, le reste manque cruellement d'humour que pour pouvoir se détacher des horreurs qui nous sont contées. En fermant le livre, je me dis que le monde est quand même bien pourri. Avais-je besoin de ce livre pour m'en rendre compte ? Non, bien évidemment, mais j'aurais préféré en rire plutôt que d'en pleurer... Beautylicious, Babelio *
J'ai adoré le premier chapitre qui se déroule pendant l'enterrement de Mia. J'imaginais la tête de l'assemblée pendant le discours de Jean , l'amant . J'ai jubilé ! J'ai aimé les chapitres où Mia raconte ses souvenirs dans un journal posthume donné à Jean. Certains sont émouvants. Les souvenirs de Jean m'ont paru moins intéressants du moins jusqu'à sa rencontre avec Mia. Certaines réparties dans les dialogues sont efficaces et m'ont fait sourire. En plus de l'adultère , des thèmes actuels comme le terrorisme, le harcèlement sont abordés. De belles tournures de phrases sont présentes et l'écriture est fluide. J'ai passé un bon moment. StephG54, Babelio *
Quoi de
neuf docteur ?Le récit débute sur un geste fort : médecin gynécologue de son état, Jean, qui assiste aux funérailles de son amante, est invité par le mari de la défunte à prendre la parole et il lâche le morceau devant l’assemblée médusée. Mia, cette jeune femme que l’on pleure était aussi sa bien-aimée et avec sa perte, le sol se dérobe sous ses pieds. Il s’ensuit une rixe avec l’époux en colère, la police est appelée, le carabin insolent emmené au poste. Cet épisode passé, l’auteur revient sur la genèse de cette relation. Jean est marié lui aussi et son couple vit ses derniers moments alors qu’il annonce à un groupe d’amis son divorce imminent. Mia et Yann, son mari, sont présents. Ce dernier repas pris ensemble sonne le glas d’une forme d’innocence, feinte ou non. Jean est libéré et il se rapproche de Mia qui est malmenée sous ses yeux par un conjoint bourru et macho. Avec Jean, la jeune femme découvre la douceur et le réconfort, ils deviennent amants dans le prolongement de cette complicité. Et lorsque l’aimée est atteinte d’un cancer qui se soldera par son décès prématuré, Jean sera l’accompagnant tout désigné et légitime. Il sera aussi le confident de la malade. Ses a veux publics après le décès bousculent la donne, mais passé l’affrontement avec le mari détrôné, il demeure un proche des enfants face à un père qui s’avoue dépassé et faible. Il sera le soutien évident lorsque des difficultés surgiront qui nécessiteront son intervention bienveillante. Le récit, placé sous le point de vue de Jean qui s’affirme en narrateur, suit un mouvement rapide. Si sa relation avec Mia semble appelée à occuper l’avant-scène, elle laisse place par la suite à des épisodes sans lien direct avec celle-ci au cours desquels sont abordées des thématiques telles que le harcèlement sur les réseaux sociaux. Jean-Pierre Balfroid a bâti le récit comme une suite de séquences qui font songer aux séries télévisées et son approche des questions sociétales (la vie en couple, l’amitié, l’euthanasie, les attentats terroristes, les dérives des relations destructrices entre adolescents) confirment qu’il se situe bien dans cette veine. L’insistance mise sur le statut et le rôle spécifique du médecin ajoute une dimension supplémentaire au récit, celle de l’éthique des métiers de la santé, avec l’exigence de la juste distance, du secret professionnel. Sans oublier de parler par ailleurs des questions posées par leur transposition dans une œuvre artistique. Mine de rien, Le choix de Mia est donc bien plus que la chronique d’une relation amoureuse. Envolé, vif, drôle parfois, le récit est une forme de miroir tendu à notre monde qui évite la dramatisation excessive tout en abordant avec nuance des thématiques sensibles bien ancrées dans la réalité contemporaine. Thierry Detienne, Le Carnet et les Instants. *
[…] Un premier roman très riche […] l'histoire d'un adultère assez corsé, qui trouve son aboutissement en un pugilat lors des obsèques de l'héroïne. Mais ces obsèques ne sont pas un point final : l'héroïne, avant de décéder, a demandé à son amant de garder un œil sur l'éducation de ses deux enfants, fille et garçon. Débute alors une seconde partie, sur un thème hélas de plus en plus fréquent dans notre société, le harcèlement dans les écoles, via Internet. Entre-temps, un attentat de kamikaze islamiste, décrit avec une précision remarquable. Enfin, couronnant le tout, ce harcèlement, remarquablement écrit lui aussi, et la tentative de suicide de Romane, la fille de Mia, et sa lente guérison… On le voit, un roman très riche, […] une sorte d'eutrophisation, avec des thèmes qui sont d'actualité, des personnages hauts en couleur : l'amant est gynécologue, le mari, lui, collectionneur d'objets remontant à la Seconde Guerre mondiale. L'auteur a de la verve et du style, vous ne risquez donc pas de vous ennuyer […] Joseph Bodson, Reflets Wallonie-Bruxelles. *
Le mari, l’amant et le crabe?! Lors des obsèques de Mia, Jean, l’ami de la famille, révèle publiquement qu’il avait une relation avec elle, provoquant une véritable émeute. Rentré chez lui, il ouvre le paquet que Mia lui a confié à condition de ne pas l’ouvrir avant son décès?; il contient son journal intime dans lequel elle raconte sa vie en commençant par les viols qu’elle a subis de la part de son beau-père. Le narrateur raconte la vie de Jean et de Yann, le fils du beau-père maudit devenu l’époux de Mia, et parallèlement Jean lit le journal de Mia. L’histoire de Mia et de Jean est une histoire d’adultère comme il y en a des millions par le monde, une histoire banale qui prend une dimension tragique. Yann, le mari de Mia, est le fils de son bourreau, c’est lui qui l’a tirée des griffes de son père avant de l’épouser puis de la délaisser un peu au profit de sa passion pour la Deuxième Guerre mondiale. Mia accepte les avances de Jean, un gynécologue réputé, séparé depuis peu de son épouse. Jean fréquente assidûment la famille de Mia sans que Yann soupçonne l’idylle. Cette liaison aurait duré longtemps si la maladie ne s’était pas invitée dans ce ménage à trois. Après les obsèques de Mia et un long deuil, Jean renoue avec la famille de Yann, et notamment avec Romane, sa fille, qui part complètement à la dérive. Elle tente de se suicider après avoir été persécutée par des élèves de sa classe et connaît de nouvelles mésaventures encore plus graves en essayant de trouver une place dans le milieu du spectacle où son charme ne lui vaut pas que l’admiration des spectateurs. Une histoire d’amour romantique et triste, un roman noir, un plaidoyer pour la défense des femmes agressées… un peu de tout ça réuni dans un texte à l’hommage de l’amour pur. Mais hélas, les cœurs purs ont rarement raison, les mésalliances bien plus pitoyables que les amours adultérins sont bien plus stigmatisées que ceux-ci. Les couples ne sont pas encore constitués à l’aune de l’amour, comme le chante l’auteur dans un texte pessimiste et résigné : Et voilà la vie Comme elle coule Et voilà la vie Comme elle roule Jamais dans le sens que tu veux Mon frère, fais ce que tu peux. Débézed, critiqueslibres.com et mesimpresssionsdelecture |
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