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Extrait Les
semaines passèrent. Avec le temps, le souvenir du PIAF
s’était presque effacé.
Le jour où j’ai reçu la première lettre, Line venait de se mettre au boulot. – Du courrier, ce matin, monsieur?? Elle avait lancé ces mots distraitement, tout en garnissant le lave-vaisselle. D’habitude, je répondais toujours quelque chose. Mon silence l’inquiéta. – Ça ne va pas?? Une mauvaise nouvelle?? Mais?? Monsieur Sylvain, c’est si grave?? J’étais effondré sur une chaise, une main pendante et, au bout de cette main, un papier. J’ai fait un effort pour souffler d’une voix mourante?: – Lisez. Line s’est emparée du feuillet. – Aïe?! Une lettre du fisc?! C’est jamais bon signe. Qu’est-ce qu’ils vous veulent?? Elle n’attendait pas de réponse, je devais avoir l’air aussi dynamique qu’une pile déchargée. – Quoi ! Une amende de cinq cents euros pour quelque chose qui n’existe même plus?! C’est une blague?? – Ce n’est pas le genre du fisc de faire des blagues. Vous voyez, c’est ça, la machine administrative. […] |
Ce
qu'ils en ont dit
* Robert Massart nous explique de quelle manière nous débarrasser d’une inspectrice des impôts qui nous harcèle?? Voilà le pitch de ce roman jouissif qui met en scène un enseignant coincé dans le système kafkaïen de l’administration publique et qui subit de plein fouet le zèle d’une de ses représentantes. Concocter un meurtre n’a rien d’évident pour un quidam, peu familiarisé avec les méthodes du crime. Heureusement, une femme de ménage, un vendeur de supermarché, un sans-abri et quelques autres acceptent de le conseiller, voire à mettre la main à la pâte. Pourtant, entre les intentions et l’acte décisif, un gouffre se creuse. Bruxellois d’origine, l’auteur propose un récit qui convoque une bonne dose de cynisme et qui fait du bien grâce à un ton irrespectueux qui abandonne les valeurs morales pour embrayer dans le délire pur jus. L’ambiance est salvatrice, même si chacun se doute que le protagoniste n’ira jamais au bout de son projet. Quoique?? Sam Mas, Bruxelles-Culture *
Extraits de rôles Sylvain Brunard est un quinquagénaire sans histoires. Il mène une vie paisible de célibataire endurci ponctuée de soirées au resto du coin et de rencontres dans son quartier bruxellois malmené par quelques faits divers. Enseignant le français dans un lycée, il se plaît à défendre la langue française et il a accepté, face à un collègue insistant, de reprendre la présidence d’une association sans but lucratif qui s’est fixé le noble objectif de porter assistance à des professeurs de français en détresse. Pour se décharger des tâches ménagères, il s’est adjoint les services de Line, avec qui il converse volontiers de choses et d’autres. Lorsqu’il reçoit une lettre du ministère des Finances destinée à son ASBL l’enjoignant de rentrer une déclaration en retard, il s’en ouvre à Line. L’association étant dissoute, il ne comprend pas qu’on lui réclame ce document. Line l’engage à faire valoir ses droits avec détermination. Il ne sait pas alors qu’il va mettre le doigt dans un engrenage administratif qui mettra à mal sa quiétude. Les mises en demeure se succèdent rapidement, de plus en plus menaçantes, faisant de ce problème une obsession quotidienne. Entretemps, Line lui a présenté son mari, un Cubain exilé qui prête une oreille attentive au récit de ses déboires et le prend au mot quand il maudit ses interlocuteurs fiscaux. Il lui offre ses services de grand maître de la santeria, une forme de magie noire qui ne dit pas son nom. S’ensuivent des faits troublants qui affectent le service réclamant la fameuse déclaration, puis une rencontre avec Georgette Martens, gestionnaire du dossier, qui est somme toute avenante, et avec qui Sylvain Brunard lie connaissance et parle musique, elle le convie à des concerts, la méfiance laisse la place à une certaine connivence… C’est donc une forme de comédie de boulevard un rien irréelle, comme elles le sont toutes, mais aux accents familiers, agrémentée d’humour et de rebondissements, que La déclaration déroule sous les yeux du lecteur. Brossés à grands traits, les personnages donnent la réplique avec vivacité et brio tout en laissant entrevoir leurs cocasses faiblesses. Avec ce second roman, qui s’inscrit dans la droite ligne du premier, Une histoire belge, Robert Massart ravira les lecteurs qu’il avait conquis?: le texte, servi par une langue tout à la fois soutenue et volontiers joueuse, contribue à faire de cet opus délibérément léger un remède indiqué et efficace en cas de morosité persistante. Thierry Detienne, Le Carnet et les Instants |
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