Illustration de couverture : © Sarah Kaliski / doc. AML |
DITS DE LA NUIT Contes et légendes d'Afrique centrale Choix et présentation de Véronique Jago-Antoine et Antoine Tshitungu-Kongolo Publié en
coédition avec
Les Archives & Musée de la Littérature sous la direction de Marc Quaghebeur 256 pages ISBN : 978-2-87168-079-6 (livre) – 978-2-8070-0117-6 (PDF) – 978-2-8070-0118-3 (ePub) 15,00 EUR Préface de Marc Quaghebeur Illustrations de Djilatendo Réédition Au cœur de la veillée, dans l’ombre, une voix s’élève, gardienne de la mémoire du monde. C’est l’heure du conte. Après les légendes de nos contrées, voici, sous les regards croisés de Belges que fascina la découverte du continent noir et d’Africains soucieux d’en préserver l’inestimable patrimoine oral, des fables du Congo, du Rwanda et du Burundi. Récits des origines, bestiaires humoristiques ou satiriques, légendes merveilleuses s’offrent en un florilège qui séduit tout à la fois par l’universalité de ses thèmes et par la singulière liberté d’esprit de ses traditions. En découvrir les saveurs originales, demeurées longtemps à l’écart des civilisations de l’écrit, est une façon de renouer avec l’histoire africaine et d’entrer au cœur du métissage des francophonies. (Marc Quaghebeur, extrait de la préface) |
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8,99 EUR |
Extrait Une
nuit,
il y a bien longtemps, un vieil homme rêva de princesses,
de
monstres, d’animaux parleurs et d’arbres marcheurs. Toute
la matinée,
il mêla dans sa tête les images fabuleuses du songe. Il en
fit une si
belle histoire qu’il riait lui-même en l’inventant.
Dans l’après-midi, ses amis lui rendirent visite pour le consulter au sujet d’une sérieuse affaire. Le vieil homme les réunit sur le seuil de sa hutte autour d’une cruche de bière. Il écoutait d’une oreille distraite les récits de ses invités qui parlaient de champs dévastés, de troupeaux attaqués par les bêtes de la forêt voisine. Pour leur exposer son stratagème, le vieil homme cita l’un ou l’autre animal de son rêve et le fit discourir dans le langage des hommes. De fil en aiguille, il en vint à raconter sa nouvelle histoire. Et chacun d’oublier ses colocases piétinées, ses agneaux éventrés… Un enfant s’approcha… Émerveillé par l’histoire, il courut chercher son frère qui avertit des voisins. Bientôt, tous les gens de la colline : potiers, semeurs, bergers… arrivèrent dans le rugo. Or, c’était l’heure où chacun devait vaquer à son ouvrage : palabres, labours, pâturage… Que de catastrophes dans le village déserté ! Les vases d’argile éclatèrent dans le four surchauffé du potier. Les vans de semences, abandonnés par les semeurs, furent la proie des oiseaux. Les vaches partirent à l’abreuvoir sans leur berger et s’enlisèrent dans le marais… D’en haut, le Grand Dieu Imana contemplait tristement son peuple paresseux. « Tous les gens de cette colline, se dit-il, Préfèrent se griller au soleil, Au lieu de faire fructifier Les biens que je leur ai donnés. Qu’ils se prélassent toute la journée ! Autant qu’il leur plaît ! Dans les fourrés et sur les pierres surchauffées ! » Le vieux conteur termina sa longue histoire par la formule consacrée : « Sijyé wahéra hahéra Nyanaka… Mon histoire est finie Mais moi je ne suis pas fini… Je suis en vie ! » À ces paroles, chacun sortit de son rêve pour réclamer une autre histoire. Mais le Vieil Homme n’était plus là ! À sa place, sur le tabouret, était assis un Vieux Lézard ! |
Ce qu'ils en ont dit |
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Peu importe l’âge que nous avons, j’ai toujours adoré apprendre de nouvelles choses, alors cette anthologie reprenant des contes, des légendes, des fables, des écrits d’une autre culture, je dis un grand oui. Pour ma part, je ne connais pas grand chose de la culture africaine, si ce n’est ce que j’en ai déjà lu ou vu à la télé. Alors ce genre d’anthologie, eh bien moi j’aime énormémént. Avec elle, je me suis mise à voyager très loin, sous le soleil brûlant d’Afrique. Je suis passée par des contes sur les origines, j’ai fais un détour par des fables, en passant par des contes initiatiques ou encore sentimentaux. C’est le genre de livre que j’affectionne tout particulièrement parce que nous ne sommes pas forcément obligés de tout lire en une fois (ce que j’ai fais ici pour ma chronique bien entendu), mais si nous avons juste envie de lire une fable, ou encore un conte, alors nous en avons la possibilité. Chose que je ferai de temps en temps, je relirai certains passages de ce livre. Lorsque mon fils m’a vue avec le livre en main, il m’a demandé ce que je lisais, il trouvait la couverture étrange. Mais je suis ravie (…) Lorsque que je l’ai terminé, je n’ai pas eu le temps de le poser qu’il me le réclamait déjà. Alors au final, non seulement j’ai adoré ma lecture, qui est d’ailleurs un de mes coups de coeur, mais mon fils va partir également faire ce superbe voyage dans d’autres contrées et ainsi apprendre de nouvelles choses sur une autre culture. Un excellent livre à s’offrir ou à offrir sans hésiter ! Alouqua, Le monde enchanté de mes lectures. *
Plus de vingt ans
après une première publication
dans
la collection Espace Nord, voici un
florilège
qui trouvera sa place dans les bibliothèques de la
fran¬cophonie. « Dits de
la Nuit »
est une nouvelle anthologie de contes et légendes (Congo,
Rwanda et
Bu¬rundi). Les éditions belges M.E.O.
(Monde–Édition–Ouverture) se
joignent aux Archives et Musée de la Littérature pour mettre
à
l'hon¬neur des récits qui ont traversé des lunes. Des
conteurs, des
passeurs de mémoire, des écrivains ont porté jusqu'aux
confins du XXe
siècle les histoires venues de la nuit des temps.
Rassemblées par
quelques chercheurs, elles peuplent aujourd'hui les pages
d'un
intéressant volume qui com¬porte également un lexique et des
repères
utiles.« Pourquoi maintenir sous le bois¬seau une telle moisson ? interroge Marc Quaghebeur dans la préface. Pourquoi la réserver aux spécialis¬tes ? Elle fait partie de nos histoires, nous avons trop tendance à l'oublier. Celle qui vit des missionnaires ou des administrateurs, des princesses même, collecter une richesse qui les in¬triguait et les interrogeait. Elle suscita très vite des talents chez les Africains scolarisés à l'occidentale. Des écri¬vains, belges ou africains, y lièrent la forme de leur art. Thadée Badibanga ou Olivier de Bouveignes, pour ne citer que ceux-là. » Les commentaires et la lecture de Véronique Iago-Antoine et An¬toine Tshitungu-Kongolo permet¬tent d'appréhender un bagage de contes, bestiaires, légendes et fa¬bles d'une tradition vivante, en langue française. Le chant et la poésie s'intègrent aisément aux textes. À l'heure du Printemps des Poètes, centré celte année sur l'Afrique, ces lignes sont les bienvenues : « Qu'on aille où l'on veut. / Qu'on traverse les bois. Qu'on se plonge dans les ma¬rais. Il nous faut le ser¬pent. Qu'un jour tu fis partir… » Ce sont les « Récits des origines » qui ouvrent le recueil. Ils expliquent la créa¬tion ou la découverte du monde, l'aspect des êtres et des choses (« Pourquoi la guêpe a la taille si mince »). Parmi les « Contes initiatiques et moraux » qui les suivent, une histoire fut rapportée en 1936 par la princesse de Ligne dans la revue Grands Lacs. Françoise Lison-Leroy, Le Courrier de l’Escaut, 27-02-2017. *
Que connaissons-nous des contes et des
légendes
d’Afrique centrale ? A priori pas grand-chose ! Nés dans le
berceau des
civilisations, ces récits séculaires ont traversé les âges
pour nous
parvenir le plus souvent par le biais de la transmission
orale.
Satiriques, humoristiques ou liés à divers mythes de
création, ils ont
longtemps été le miroir des sociétés actives au Congo, au
Rwanda et au
Burundi. Même s’il est parfois difficile pour nous Européens
d’en
saisir toute la saveur, ils se voulaient dès leur origine
pédagogiques
ou philosophiques. Traitant de thèmes divers, ils témoignent
d’une
gigantesque liberté d’esprit et résument les préoccupations
de femmes
et d’hommes qui ont vu débarquer sur leur territoire les
premiers
Européens. Les textes ont été regroupés en diverses parties,
présentées
de la sorte : récits des origines, contes initiatiques et
moraux,
fables, contes merveilleux et contes sentimentaux. L’ouvrage
s’achève
avec une brillante analyse signée Véronique Jago-Antoine et
Antoine
Tsitungu-Kongolo, ainsi qu’un lexique idoine et un index. Paul Huet, Bruxelles Culture |