Né à Nova Gradiška (République de Croatie) en 1945, Tomislav Dretar est titulaire d’un diplôme de la Faculté pédagogique de Rijeka et d’un troisième cycle à l’Université de Sarajevo. Il sera professeur à l’Université de Biha? (Bosnie-Herzégovine) jusqu’à l’éclatement de la guerre en 1992. Par ailleurs, poète et critique, il a publié une dizaine de recueils, dont des extraits figurent dans plusieurs anthologies bosniennes, ainsi que de nombreux articles en journaux et revues. Forcé de fuir la Bosnie durant la guerre, il s'est réfugié en Belgique oùil vit depuis lors et a obtenu la nationalité belge. Il y a étudié le français, traduit en croate un recueil de poèmes de Monique Thomassettie, un récit de François Emmanuel et des nouvelles de Michel Lambert. Il a également traduit des textes de Charles Baudelaire, Georges Perec, Jean Cayrol, Xavier Deutsh, William Cliff, Paul Celan, Marc Quaghebeur, Carl Guesmer… Il a enfin traduit (à partir du français) la Bible (version œcuménique) et le Coran, publiés sur le net. Il collabore avec Gérard Adam à la traduction en français d’auteurs croates et bosniens (Admiral Mahi?, Dražen Katunari?, Karmen Media, Žarko Mileni?…) |
||||||||
Tableau de couverture : © Monique Thomassettie "Matin dans la ville" |
Aux Portes de l'Inaccessible Na Vratima Nedostupnog Poèmes, 2009 104 pages. ISBN: 978-2-930333-26-7 14 EUR Traduit du croate par l'auteur et Gérard Adam Publiés en Bosnie-Herzégovine avant la guerre, et disparus dans la tourmente, ces textes reparaissent ici dans une version bilingue français – croate. Poèmes d’amour humain, poèmes d'amour mystique… Poèmes, aussi, du pressentiment de l’exil ! À chacun de les accueillir selon sa propre sensibilité ! |
|||||||
6,99 EUR |
||||||||
AUJOURD’HUI
TU
T’ACCROIS de moi, ô toi, goutte fertile de ténèbres. Telle
une voile
ouverte aux océans lointains, tu planes dans la gorge, dans
le mot
d’une clarté opiniâtre. Tu n'as pas d’aile, de lien avec le
rivage. Toi
l'oiseau, forme d’avant toutes les formes. En vol à travers
le rien qui
fleurit. Je sombre au tréfonds de toi et je sais. Dans cet
océan, je
suis la seule direction par où coule la profondeur. Ainsi,
nous sommes
un. Dans le courant. Dans la même direction. Dans la
profondeur.
* DANAS
IZRASTAŠ
iz mene, ti plodna kapljico tame. Kao jedro otvoreno dalekim
oceanima lebdiš u grlu, u rije?i prkosne vedrine. Ti nemaš
krila, vezu
s obalom. Ti ptico oblika prije svih oblika. U lijetu kroz
ništa koje
procvjetava. Tonem na dno tebe i znam. U ovom oceanu ja sam
jedini
smjer kojim te?e dubina. Tako smo jedno. U tijeku. U istom
smjeru. U
dubini.
|
||||||||
Ce qu'ils en ont dit Au seuil de la souffrance, historiquement présente, le sentiment d'abandon se retrouve à peu près dans chaque texte. Abandon, perçu dans sa double valeur sémantique, et qui suggère tantôt le renoncement (à soi et aux éléments), tantôt la rupture. Un violent sentiment d'incomplétude alimente une poésie par ailleurs investie par le sentiment amoureux. Le poète procède par ajouts; il progresse dans son intention de ne rien laisser au doute, de ne jamais céder à la confusion. Autant de greffons qui s'articulent sur une charnière robuste et explicite: « Ainsi nous sommes un. Dans le courant. Dans la même direction. Dans la profondeur. » À d'autres moments, Tomislav Dretar privilégie le mètre court, le vers disloqué, sans doute pour provoquer l'effet de surprise ou d'aliénation: « La glace est là / Où tu t'en es /Allé, / Suivant la lumière / Toi, l'audacieux iris. » On se réjouira de la qualité des chutes qui identifient le poème tout entier. Ainsi: « Là-haut, / Par-dessus le glacier / De mon âme, / Passe l'ombre / D'une rose. » Ainsi: « Soleil rond et doux, et chaude, chaude aurore.» Une lecture complice et fraternelle. Michel Joiret, Le Non-Dit. L'inaccessible n'est-il pas espoir ? Ces textes ont été publiés en Bosnie-Herzégovine avant la guerre; les éditions Mode Est-Ouest en proposent ici une version bilingue français–croate. Professeur, poète et critique, Tomislav Dretar a quitté la Bosnie pendant la guerre, sous la menace, prenant le chemin de l'exil vers la Belgique où il trouve refuge et où il exerce ses talents de traducteur croate-français. Textes de l'incertitude et d'un exil à venir, ces mots ont des résonnances d'inquiétude et de souffrance, d'un formidable espoir aussi. Prémonitoires ou prophétiques? Qui peut le dire... Toujours est-il que l'auteur s'interroge ici sur ce qui constitue nos fondements mais aussi sur ce qui ébranle nos certitudes, notamment affectives et amoureuses. Les corps se cherchent, les esprits s'affrontent, les mains finissent par se trouver et les mots se heurter; lent et long déroulement d'une vie, seul ou à deux, qui s'écoule au fil des jours. le
feu sur ton visage
La vitre brisée du rêve reflète Tes pensées clarifiées De toute angoisse Tu ne vieilliras pas à l’ombre De cette roche Réconciliée avec le silence discordant Par-dessus l’enfance Tu poses ta tête sur ma poitrine Entres en moi Qui saurai vivre en toi Dans le sang et la chair chaude du poème Tu tombes endormie À présent tu es la rivière large et paisible Qui jamais ne sort de ses rives Sans douleur La recherche d'un refuge est également très présente dans ce recueil, constitué de bras ou de mots d'amour, d'un regard ou d'un toit. La douceur se fait brute et l'appel pressant, comme si la vie en dépendait, comme si la conscience que ces années qui nous sont données à vivre peuvent prendre fin à tout moment finissait par prendre le dessus sur toute forme de sagesse. Mais réaliser cet état de fait, notre caractère éphémère, n'est-il pas justement une grande forme de sagesse, D'apaisement également, à l'image de ce qui ressort des mots de Tomislav Dretar, entre assurance et détachement, pression et précarité. Dans ton œil Toute paix est impossible. Jamais par le silence Tu ne t’effondreras Dans mon angoisse. Même si A découvrir ! Sahkti, critiqueslibres.com |
||||||||
Retour au catalogue |